Pesticides et santé publique : les citoyens se mobilisent, mais l’État se trompe de camp

Dans une chronique publiée dans le quotidien La Croix daté du lundi 29 décembre 2025 (que j’archive ici par commodité), Lucile Schmid revient sur le soutien exprimé par de nombreux citoyens à la pétition déposée par Eleonor Pattery sur le, site Web de l’Assemblée nationale au coeur de l’été. Cette pétition demandait l’abrogation de la loi dite « Duplomb », notamment parce qu’elle ouvrait la voie à une réautorisation de l’acétamipride, un pesticide de la famille des néonicotinoïdes dont l’utilisation en agriculture avait été interdite en 2018. Des données scientifiques laissaient pourtant penser que ces deux molécules étaient susceptibles d’avoir des effets délétères sur la santé humaine et sur la biodiversité. Le conseil constitutionnel, saisi avant la promulgation de la loi par le Président de la République, avait finalement censuré cette disposition.

Le débat public qui devait se tenir à l’Assemblée nationale à ce sujet (sans qu’il puisse aboutir à une abrogation de la loi) n’a toujours pas eu lieu, mais la mobilisation inédite contre ce texte dans la torpeur de l’été montrait une vive préoccupation du public quant aux dangers des produits pesticides et à leur impact à court, moyen ou  long terme sur la santé.

Lucile Schmid note que malgré cette mobilisation, l’État a pu donner sur plusieurs autres sujets en rapport avec les pesticides l’impression de se ranger du côté des intérêts des industriels.

  • Sommé par la Cour administrative d’appel de Paris confirmant un jugement du tribunal administratif de procéder à la réévaluation des conditions de mise sur le marché et d’utilisation de nombreux pesticides, l’État, en la personne de Mme Genevard, ministre de l’agriculture, décide de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’État, avec les représentants des intérêts industriels.
  • La Commission européenne, sous couvert de simplification réglementaire, présentait au parlement à la mi-décembre le projet de paquet « Omnibus VII », dont certaines dispositions exonèreraient si le texte restait en l’état de nombreux produits dont certains sont problématiques d’une révision périodique de leur autorisation de mise sur le marché, révision qui devrait normalement permettre de prendre en compte dans l’avenir les données scientifiques les plus récentes quant au caractère potentiellement nocif de ces molécules. Là encore, les institutions européennes semblent donner raison aux industriels qui fabriquent et vendent ces pesticides. En filigrane, c’est la question des externalités positives et des externalités négatives de l’usage des produits phytosanitaires que pose cette chronique : quand la Commission européenne allègue que la « simplification » (ou plutôt la déréglementation) fera économiser un euro aux industriels, combien d’euros supplémentaires coûtera-t-elle aux assurés sociaux et globalement aux systèmes de santé lorsqu’il faudra rendre en charge plus de maladies et plus de malades fauchés par les effets délétères de ces molécules ?

Lucile Schmid s’interroge en conclusion sur la proximité surprenante entre les dirigeants publics et les dirigeants économiques dans ce domaine.

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