Externalités et dette environnementale

La question de la prise en compte des externalités négatives des pesticides en agriculture ou plutôt le peu d’éléments versés au débat sur le système de production alimentaire souhaitable pour les  années et les générations à venir me trotte dans la tête depuis longtemps. J’en ai eu assez vendredi dernier. Quand j’en ai assez, j’écris un billet sur le mode « ça va mieux en le disant ».

Coïncidence amusante, dans Le Monde daté des 14 et 15 septembre 2025, la chronique de Stéphane Foucart aborde ce sujet, entre autres. Bien mieux que moi sans doute (journaliste, c’est un métier…).

Je recommande vivement la lecture de ce texte :

Crise écologique et dette publique.

La version Web est ici (réservée aux abonnés) :

« En aggravant la crise écologique, le mouvement de dérégulation actuel risque, à terme, de faire exploser les comptes publics »

Dans les bruyants débats qui ont accompagné l’adoption de la loi Duplomb depuis la proposition déposée devant le Sénat jusqu’à la promulgation intervenue au début du mois d’août 2025, cette notion d’externalités négatives a été très peu mobilisée et je trouve que c’est regrettable, parce qu’on dispose de travaux à ce sujet, et qu’elle permet de prendre un peu de hauteur et de débusquer les coûts cachés de nos choix en matière d’environnement et, en ce qui concerne la loi Duplomb, le choix, en conscience, d’un système de production agricole et alimentaire désirable et durable (mais S. Foucart n’évoque pas la seule question de l’agriculture).

Et pour décider en conscience, il faut mobiliser la science (dans conscience il y a science – et un autre mot pas très poli, d’ailleurs, mais c’est une autre histoire) en expliquant et en faisant dialoguer les experts (et les paysans sont des experts à mon avis), les décideurs, et le public.

Je me demande si les  plus de deux millions de signataires de la pétition lancée par Éléonore Pattery et qui a eu tant de succès, ne demandaient pas simplement que le débat ne soit pas escamoté mais qu’il permette à chacun de comprendre et à tous, en société, de choisir.

Pour ne reprendre que le point du texte qui a provoqué le plus de réactions de rejet, à savoir la réautorisation de l’acétamipride… La possibilité d’utiliser ce pesticide dont il est très probable qu’il présente un danger pour la biodiversité (en particulier pour les abeilles et les autres insectes pollinisateurs) et pour les humains (directement ou via la pollution des sols et de l’eau, par exemple) remettait d’après les tenants de la loi et notamment les amis de la betterave sucrière et des noisettes à égalité avec leurs homologues européens (la molécule étant autorisée dans certains pays de l’Union). Elle présentait « l’avantage » de doter les producteurs français d’outils équivalents pour lutter à armes égales contre ceux des autres pays. Mais le produit de ce moindre déficit de rendement (j’hésite vraiment à parler de gain plutôt que de moindre déficit).excédait-il dans ce cas particulier et plus largement dans le choix de la chimie pour la production agricole, par le recours aux pesticides, le coût de la prise en charge des malades supplémentaires qu’une utilisation massive de ces produits précipiterait dans le désespoir et dans les bras… des systèmes de santé.

Le bénéfice à court terme aux producteurs et transformateurs et les coûts supplémentaires pour les systèmes de santé ?

C’est inacceptable !

Je préfère, dans la société que je désire, dépenser le surplus pour produire en minimisant l’impact sur l’environnement et les humains que manger du sucre à pas cheret laisser nos enfants et petits enfants réger l’addition quand il faudra soigner plus de malades, plus jeunes….

Tout cela valait bien un billet de blog, non ?

Sur le coût réel des pesticides et des systèmes de production intensifs en intrants :

Pesticides, un modèle qui nous est cher (étude réalisée conjointement par Pollinis, le CCFD et Basic – 2021).

Dans Alternatives économiques, quelques articles qui remettent bien les choses en place :

Les externalités négatives – Guillaume Duval , 01/07/2017 – article réservé aux abonnés.

La loi Duplomb est aussi un non-sens économiqueHarold Levrel, qui est professeur d’économie écologique au Muséum national d’histoire naturelle, 23/07/2025 – article réservé aux abonnés

Philippe Pointereau : « Le succès de la pétition contre la loi Duplomb montre que les défenseurs de l’agriculture intensive sont allés trop loin » – propos recueillis par Mathieu Jublin, 22/07/2025 – Cet entretien m’avait complètement échappé. P. Pointereau est un agronome dont j’apprécie particulièrement les prises de position. Il est avec quelques autres à l’origine de la constitution de Solagro.

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